Brésil : Dilma Rousseff remporte le premier tour de la présidentielle

Il y a 8 heures Le Nouvel Observateur avec AFP
Dilma Roussef, présidente du Brésil, le 5 octobre 2014. © Evaristo Sa/AFP Dilma Roussef, présidente du Brésil, le 5 octobre 2014.
La présidente brésilienne de gauche Dilma Rousseff affrontera le 26 octobre le social-démocrate Aecio Neves au second tour d'une élection présidentielle très disputée, dans cet immense pays émergent d'Amérique latine en pleine mutation.
Dilma Rousseff, candidate du Parti des travailleurs (PT) au pouvoir depuis 12 ans, a largement viré en tête du premier tour dimanche 5 octobre, avec 41,48% des voix, selon des résultats officiels presque définitifs.
Mais son rival du Parti social-démocrate brésilien (PSDB) Aecio Neves, en pleine dynamique d'ascension, a obtenu un score de 33,68%, bien supérieur aux 26-27% annoncés par les sondages de samedi.
L'ex-populaire gouverneur de l'Etat de Minas, le deuxième plus peuplé du Brésil, a éliminé l'ex-favorite surprise de cette élection, l'écologiste Marina Silva, qui n'a finalement obtenu que 21,29% des voix.
Le campagne du second tour promet une bataille acharnée entre Dilma Rousseff et Aecio Neves pour rallier les voix de Marina Silva, une dissidente du PT qui prônait une politique socialement à gauche et économiquement à droite.
Aecio Neves, se disant "honoré de représenter l'espoir de changement au second tour", a immédiatement appelé le Parti socialiste brésilien (PSB), dont Marina Silva défendait les couleurs, à se joindre à lui pour battre Dilma Rousseff.
"C'est l'heure d'unir nos forces. Ma candidature n'est pas celle d'un parti politique, mais d'un ensemble d'alliances" au service de "tous les Brésiliens qui ont la capacité de s'indigner", a-t-il déclaré.
Etats-majors politiques, commentateurs et électeurs attendaient avec impatience de connaître les consignes de vote du PSB et de Dilma Silva, qui prônait une "nouvelle politique" en rupture avec 20 ans de bipolarisation PT-PSDB.
Marina Silva n'a pas voulu se prononcer immédiatement. "Nous allons organiser des réunions, dialoguer entre nous" avant de prendre une "décision conjointe" fondée sur les programmes, a-t-elle expliqué.
Mais elle a ajouté : "Le Brésil a clairement signifié qu'il n'était pas d'accord avec la situation actuelle."
Dilma Rousseff a remercié depuis Brasilia les électeurs pour sa victoire au premier tour, sous les cris de ses militants : "Un deux trois, Dilma encore une fois !"
"La lutte continue, une lutte qui sera victorieuse parce que c'est la lutte du peuple brésilien. Cette lutte est la lutte des bâtisseurs de l'avenir qui ne laisseront jamais le Brésil revenir en arrière", a déclaré l'ancienne guérillera.
"Aecio Neves renaît de ses cendres et arrive au second tour avec beaucoup de force. Je crois que Rousseff et Neves ont chacun 50% de chances de l'emporter. La campagne va être très courte et très intense", a commenté pour l'AFP l'analyste politique André César, du cabinet de consultants Prospectiva.
Plus de 142 millions d'électeurs brésiliens ont voté dimanche pour élire leur président, mais aussi leurs 513 députés fédéraux, 1.069 députés régionaux, ainsi que 27 gouverneurs et un tiers du Sénat (27 sièges) parmi plus de 26.000 candidats.
Les électeurs du géant émergent d'Amérique latine sont partagés entre fidélité au bilan des conquêtes sociales initiées par Lula (2003-2010), le mentor de Dilma Rousseff, et coup de barre libéral au centre pour relancer l'économie en panne.
"Je vote PT pour tout ce qu'ils ont fait pour moi, même si j'ai peur que la situation économique actuelle ne nous affecte", confiait dimanche Eliana Veracruz, une employée hospitalière de 60 ans.
Eunice Daros, fonctionnaire de 46 ans à Brasilia, réclamait au contraire un "changement radical". "Les classes moyennes ont été les plus lésées par le PT. Nous payons plus d'impôts et ne recevons rien en échange tandis que les classes les plus basses reçoivent de l'aide sociale", se plaignait-il.
Ces élections se déroulent dans un contexte bien différent de celles de 2010, remportées par Dilma Rousseff dans l'euphorie finissante du "miracle" des années Lula.
Le vent a tourné pour la septième puissance économique mondiale : quatre ans de croissance au ralenti jusqu'à l'entrée en récession au premier semestre, sur fond de poussée de l'inflation (6,5%) et de dégradation des comptes publics. Un maigre bilan contrebalancé par un taux de chômage historiquement bas (4,9%).
La classe politique a été ébranlée par la fronde sociale historique de juin 2013. La génération Lula avait manifesté en masse contre la corruption des élites, exigeant une amélioration de l'éducation, de la santé et des transports publics, en lieu et place des milliards engloutis dans l'organisation du Mondial-2014 de football.
Le PT a aussi vu son image ternie par des scandales de corruption.
Mais son héritage de programmes sociaux et d'amélioration du niveau de vie lui vaut le soutien fidèle des classes populaires et des régions déshéritées, tel son bastion du Nord-est.
Plus de 40 millions de pauvres ont rejoint la classe moyenne - pour la première fois majoritaire à ces élections - et accédé à la consommation depuis 2003.
Mais la situation économique de cette classe moyenne a stagné pendant le mandat de Dilma Rousseff. Elle est aujourd'hui divisée, comme l'ont montré les résultats très disputés du premier tour dans le sud-est industrialisé.
C'est là que Dilma Rousseff et Aecio Neves vont se disputer la victoire finale.

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