RDC : probable glissement du calendrier électoral
09 nov 2014
L’annonce
d’un prochain recensement général de la population et les problèmes
financiers de la Commission électorale congolaise (CENI) font craindre
un report des élections locales de 2015 et des élections générales de
2016.
Le vaste projet de recensement de la population congolaise, annoncé
début novembre, peut-il retarder l’organisation des élections locales,
prévues en 2015 par la Commission électorale (CENI) ? C’est en effet la
question que beaucoup d’observateurs se posent après la publication
d’une ordonnance présidentielle nommant les nouveaux membres du Conseil
d’administration de l’Office national d’identification de la population
(ONIP). C’est une femme, Geneviève Inagosi, qui prend la tête du conseil
d’administration de l’Office, alors qu’Adolphe Lumanu, ancien ministre
de l’Intérieur, a été nommé directeur général.
Combien de temps prendra le recensement ?
En rendant opérationnel l’ONIP, le président Joseph Kabila réactive
le serpent de mer d’un recensement complet de la population, dont les
chiffres sont obsolètes depuis… 1987. L’opération a d’ailleurs été
plusieurs fois reportée. A Kinshasa, beaucoup s’inquiètent de la
proximité d’un possible recensement avec la tenue des élections locales,
prévues en 2015. Selon la Constitution congolaise, le fameux
recensement doit avoir lieu « en amont des élections ». La
question est donc de savoir combien de temps peut prendre un tel
recensement dans un pays grand comme l’Europe occidentale, sans voie de
communication et avec une population approximative de 70 millions
d’habitants ? Seule certitude : il y a peu de chance qu’une telle
opération soit bouclée en moins d’une année. Dans un entretien accordé à
Afrikarabia, l’opposant Vital Kamerhe (UNC) estimait à 3 ou 4 ans la
durée nécessaire pour une telle opération – voir notre article. L’inquiétude est donc grande de voir le calendrier électoral « glissé », décalant également les élections générales (présidentielle et législatives) fixées en 2016.
Retards et manque d’argent
Une autre source de préoccupation plane également sur le calendrier
électoral congolais : son financement. Après les élections contestées de
novembre 2011, le gouvernement avait affirmé sa volonté de financer
intégralement ses prochains scrutins. Selon une ONG locale, Agir pour
des Elections Transparentes et Apaisées (AETA), les autorités
congolaises avaient prévu d’allouer 169 millions de dollars au processus
électoral. Aujourd’hui, la commission électorale n’a obtenu que 30
millions. Selon l’AETA, « l’organisation des élections n’est techniquement plus possible ».
Enfin, l’Aprodec, une association congolaise basée à Bruxelles, dénonce
régulièrement les atermoiements de la CENI, notamment en ce qui
concerne la fiabilité du fichier électoral. En 2011, de nombreuses
irrégularités avaient été relevées au cours des élections présidentielle
et législatives. L’Aprodec note que « l’opération de fiabilisation du fichier électoral censée prendre fin le 21 octobre 2014 est toujours en cours ». Par ailleurs, l’audit externe qui devait débuter le 1er octobre 2014 « n’a toujours pas commencé » selon l’association.
Joseph Kabila joue-t-il la montre ?
Dans ce contexte, peu nombreux sont ceux qui croient encore réaliste
le calendrier publié par la CENI. Du côté de la majorité présidentielle
ont affirme vouloir justement tenir compte des « ratés » des élections de 2011 pour améliorer « la transparence et le crédibilité des scrutins ».
Seul souci : les retards accumulés et le manque de financement risquent
de reporter les scrutins de 2015 et sans doute ceux de 2016. Un « glissement »
du calendrier que dénoncent les partis d’opposition qui craignent ainsi
voir Joseph Kabila se maintenir au pouvoir au-delà de 2016. Le
président congolais est en effet empêché par la Constitution de briguer
un troisième mandat. Un vive débat secouait la classe politique autour
d’un possible projet de révision constitutionnelle qui aurait permis au
président congolais de se représenter en 2016. Mais après la chute du
président Burkinabé Blaise Compaoré, qui projetait lui aussi de modifier
la Constitution pour rester dans son fauteuil, il est désormais peu
probable que le parti de Joseph Kabila passe en force avec une révision
constitutionnelle. Seul moyen pour rester au pouvoir, l’opposition pense
que le président congolais « joue la montre » et retarde la
tenue des élections par manque de temps et de moyens. Pour le moment,
aucune information en provenance de la CENI n’est venue rassurer les
plus sceptiques.
Christophe RIGAUD – AfrikarabiaSource: http://linkis.com/afrikarabia.com/word/KgKJU
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